— Pas eux, mais leur argumentation.
— Ah ! Parce que tu crois que les pro-Trump sont des lumières, peut-être…
Cette conversation n’était pas nouvelle. Elle montrait avec tant d’évidence comment la volonté d’afficher la bonne posture pouvait empêcher de réfléchir par soi-même.
— Surtout pas, ils sont peut-être pire, mais là n’est pas la question. Mon point n'est pas de décerner des brevets de crétinerie ou d’intelligence aux uns et aux autres, aux Américains en plus. » Ils sourirent tous les deux. « On est tous l’idiot de quelqu’un, d’ailleurs, à tort ou raison. Ce sont les idées, que dis-je ?, les postures, — qui remplacent les idées — que je me permets de critiquer. À la fois parce que ce ne sont que des postures au lieu d’être le fruit d’une réflexion et parce que c’est de la chasse en meute, de la haine autorisée et bien-pensante.
— Qu’est-ce qui t’autorise à dire ça ?
— J’y ai réfléchi depuis des années et je suis allé m’informer, confronter ce que je voyais, ce que je croyais…
— Donc ceux qui ne pensent pas comme toi ne réfléchissent pas, c’est ça ? Il n’y a que toi qui réfléchisses ?
— Pas vraiment, encore que… essaye de le faire aussi et tu me diras si ça t’a fait évoluer, si ça enrichit ta façon de voir…
— Essaye quoi ?
— De réfléchir… par toi-même. D’oser accepter de penser une situation, sans te contenter de répéter une position lue ou vue à la télé, une posture qui évite d’aller au fond de la question et qui permet avec soulagement d'être du « bon côté », de pouvoir hurler avec les loups en toute bonne foi, béni par la bien-pensance du moment, rassuré dans la communion aux haines autorisées.
Dialogue imaginaire d’octobre 2018, qui n’a pas perdu de son actualité sur la question de Trump et s’est vu enrichi de l’illustration grandeur nature avec le covidisme.