D’abord couper la parole : faire taire,
Puis couper les débats : ne plus en parler,
Puis couper les ponts : ne pas répondre,
Couper les relations,
Rester entre soi,
Entre gens raisonnables, qui ne doutent plus,
Tous seuls.
Car la forme que prend cette nouvelle peur de vivre
C’est que l’Autre est un danger :
Même non malade il pourrait leur transmettre une maladie contre laquelle ils se réclament protégés,
L’Autre est aussi trop conspi ou trop mouton,
C’était déjà un compétiteur, dans la guerre économique de tous contre tous
Qu’ils ont embrassée ou laissée s’installer depuis des décennies,
Voilà qu’il est un miroir
Reflétant des défauts qui seraient communs,
Insupportable idée.
Enfin, l’Autre est ce modèle qui leur prouveraient qu’ils auraient pu aussi faire l’effort
De se renseigner,
De s’interroger.
Alors, bien bousculés par le choc de la sidération,
Ils acceptent les contraintes, les gestes-barrières, la distanciation sociale,
Au nom d’une Science d’autant plus magnifiée qu’ils ne la comprennent pas,
Qu’ils ne veulent pas la comprendre,
Et dont ils ne veulent même pas accepter
Qu’elle est d’abord doute, questionnement, dissensus, découverte, progrès.
Alors ils coupent, ils acceptent tous les interdits
Tous les mensonges qu’on leur sert, toutes les justifications abêtissantes,
Masques interdits,
Masques obligatoires,
Masques qui traînent dans la poche, sur la table, au coude, au cou
Et qu’ils enfilent pour marcher deux mètres de l’entrée du restaurant à la table extérieure,
Tests inutiles,
Tests obligatoires,
Tests payants,
Interdiction de sortie,
Confinement,
Couvre-feu,
Auto-attestations,
Racket hôtelier,
Produits essentiels,
Anecdotes,
Censures,
Passe dit sanitaire,
Contrôle social,
À la chinoise,
Discours de division,
Abandon des principes fondamentaux,
Principes démocratiques,
Principes juridiques,
Serment d’Hippocrate et code de Nuremberg
Principe de précaution…
Ils s’évitent,
Évitent même de se regarder
Qu’ils rentrent dans un café,
Qu’ils se croisent dans la rue, dans un magasin ou à une caisse,
Quand il y en a encore une.
Ils coupent, ils s’enferment,
Ils se collent à leur écran
Pour y téter la reconnaissance sur les réseaux asociaux de la foule haineuse
Qui les rassure.
1 De JeanBaptiste -
Même sentiment.
Il devient difficile de provoquer les moments de simple partage humain, des simples discussions, sans que l'un des deux essaie de convaincre l'autre.
Il devient fatiguant de devoir apaiser la peur que l'autre vous envoie avant de pouvoir commencer à discuter calmement.
Cela demande de plus en plus de calme et d'énergie. En espérant qu'en ayant laissé l'autre déverser sa peur, il pourra à nouveau être apaisé et recommencer à penser par lui même.
C'est un espoir...
Affection à toi.
2 De Véronik -
Merci Vincent pour tes pensées, tes textes, tes oeuvres picturales qui traduisent tellement bien ce sentiment et qui revigorent dans ce contexte avec l'envie d'un monde meilleur et non pas du meilleur des mondes.
Par chance, je fais du tri et retrouve ce lien vers ton site. Bravo et merci.
3 De Vincent François -
@JeanBaptiste :
Bonjour Jean-Baptiste,
On passe ensuite de la difficulté à apaiser la peur, à éviter d'en parler, puis à éviter de se voir...
Je me demande si les dégâts de cette peur qui justifie tout et n'importe quoi pourront être réparés.
4 De Vincent François -
@Véronik :
Bienvenue Véronik, je suis bien content que tout ceci ne tombe pas dans le vide.