Sur l’autoroute déserte, la voiture s’élève alors lentement et flotte, à vive allure, suivant toute seule la courbe de la chaussée. Ou alors sont-ce les cuivres qui la soutiennent et creusent son chemin ouaté ? Est-ce encore moi qui conduis ? Le soleil est enfin là, enveloppant et colorant l'espace. Elle est assise sur le siège passager, à côté de moi, si proche et si lointaine, tout autant portée par la musique qu'elle m'offre.
Ma poitrine s’élargit au-delà de l’habitacle, du paysage, et se remplit à seaux. Fanfare en syncopes, le corps balance au rythme des coups de trombone, dont la seconde moitié arrive toujours avec un retard délicieux. Sur un nuage de cuivres subtilement dissonant, viennent, avant l’atterrissage, tinter en rappel doux le martèlements des percussions de l’introduction.
C’est fini, le dernier souffle, salut des artistes, cornemuse expirant son dernier râle, se meurt calmement.
Les deux mains sur le volant, c’est bien moi qui conduis, le cœur plein.